Des ONG vénézuéliennes ont dénoncé que le régime de Maduro utiliserait une nouvelle loi pour renforcer le contrôle et la répression.

Publié le 16.08.2024
Loi de contrôle des ONG au Venezuela : un instrument de contrôle et de répression après les manifestations contre la fraude de Maduro (EFE/ Miguel Gutiérrez)

Des activistes des droits humains au Venezuela ont tiré la sonnette d'alarme concernant la nouvelle loi de contrôle des ONG, approuvée ce jeudi par le Parlement, en considérant qu'elle « approfondira la persécution » des critiques de Nicolás Maduro au milieu des allégations de fraude lors de sa réélection.

Le Parlement monocaméral, contrôlé par le chavisme, a voté à l'unanimité en faveur de cette loi, qui ordonne aux organisations non gouvernementales de s'inscrire dans un registre géré par le ministère de l'Intérieur et de fournir une « liste des dons » pour leur fonctionnement, où elles doivent préciser si les fonds proviennent de sources nationales ou étrangères.

Cela fait partie d'un paquet législatif demandé par Maduro après les manifestations contre sa proclamation comme vainqueur des élections du 28 juillet dernier, qui ont entraîné 25 morts - dont deux militaires -, près de 200 blessés et plus de 2 400 détenus.

« La loi a une intention punitive », a déclaré à la presse Alí Daniels, directeur de l'ONG Accès à la Justice, qui a estimé qu'environ 10 000 organisations de ce type opèrent dans le pays.

Une fois la législation publiée au Journal officiel, les ONG disposeront de 90 jours pour s'inscrire dans le nouveau registre et de 180 jours pour modifier leurs statuts afin de les adapter à la réglementation approuvée, sans délais pour la réaction de l'État.

« Ce sera une épée de Damoclès (...). Toutes les organisations qui existent actuellement seront à la discrétion, pour ne pas dire l'arbitraire, d'un fonctionnaire », a averti Daniels.

L'organisation de DDHH Provea a dénoncé que cette nouvelle législation cherche à contrôler chaque aspect de la vie des citoyens, menaçant avec des dissolutions et des amendes colossales les entités à but non lucratif déjà consolidées (EFE/ Henry Chirinos)

Il s'agit d'un « coup » pour « contrôler jusqu'au plus petit aspect de la vie des personnes et du pays (...), menaçant avec des dissolutions et des amendes colossales les ONG déjà consolidées qui respectent des dizaines de lois et d'impôts », a critiqué dans un communiqué sur le réseau social X l'organisation des droits humains PROVEA.

« Nous avertissons la communauté internationale à propos de cette loi qui approfondira la persécution des voix dissidentes et réduira l'espace civique », a-t-elle ajouté.

Espacio Público, dédiée à la défense de la liberté d'expression, a soutenu que cette norme « concrétise la criminalisation des organisations de la société civile ».

Les ONG ont été clés dans les dénonciations de violations des droits humains au Venezuela, face à l'opacité des sources officielles.

Elles sont également fréquemment la cible d'attaques de hauts fonctionnaires gouvernementaux, qui ont tendance à les accuser de fonctionner comme des « façades » pour conspirer contre Maduro avec un financement des États-Unis et d'autres pays.

Cette loi, en fait, a été présentée en janvier 2023 par le puissant dirigeant chaviste Diosdado Cabello, qui a accusé plus de 60 ONG de « déstabiliser » le pays.

« Elle vise à éliminer une ligne de défense dont disposent les Vénézuéliens, qui, durant ces 25 années (sous le chavisme au pouvoir), a soutenu les victimes », a commenté l'avocat des droits humains Eduardo Torres.

Cette loi a été présentée en janvier 2023 par le puissant dirigeant chaviste Diosdado Cabello, qui a accusé plus de 60 ONG de “déstabiliser” le pays (AP Photo/Ariana Cubillos)

« Ils approuvent cette loi dans un contexte de durcissement de la répression post-élections », a exprimé Torres.

Le non-respect de la nouvelle loi implique des amendes pouvant atteindre 10 000 dollars. Ce sont en réalité des « amendes confiscatoires », soutient Daniels.

Il existe des réglementations similaires dans la région à Cuba, au Nicaragua, au Guatemala et en Bolivie.

« Cette loi, malheureusement, nous met sur la voie du Nicaragua », a indiqué Daniels, se référant à la fermeture de plus de 3 600 ONG depuis que l'administration de Daniel Ortega a durci le cadre légal de leur fonctionnement après de massives manifestations en 2018.

Le paquet de lois demandé par Maduro inclut également une loi pour « punir » le « fascisme », terme que l'administration utilise souvent pour qualifier ses détracteurs.

Une loi sur les réseaux sociaux a également été proposée à l'Assemblée nationale, que Maduro accuse d'être utilisée pour « des campagnes de haine ». Le président a ordonné la suspension de X pendant 10 jours et promeut un boycott contre WhatsApp.

Des plateformes d'information et de divertissement ont également été bloquées par des fournisseurs d'Internet.

Le paquet de lois demandé par Maduro inclut également une loi pour “punir” le “fascisme”, terme que l'administration utilise souvent pour qualifier ses détracteurs (EFE/ Henry Chirinos)

Le Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme, Volker Türk, avait exhorté les autorités à freiner l'approbation de « lois qui sapent l'espace civique et démocratique » et a exprimé des préoccupations concernant les arrestations massives.

Son porte-parole, Ravina Shamdasani, a décrit un « climat de peur » dans lequel « il est impossible d'appliquer les principes démocratiques ».

(AFP)