Fascisme, réseaux sociaux, ONG et haine : Maduro veut protéger sa fraude électorale et poursuivre davantage l'opposition avec des lois à l'Assemblée nationale.

Publié le 13.08.2024
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Fascisme, réseaux sociaux, ONG, haine : le Parlement du Venezuela, contrôlé par le chavisme, ouvre depuis ce mardi la voie à l'approbation de lois controversées, qui selon les critiques, visent à incriminer l'opposition, qui dénonce une fraude lors de la réélection de Nicolás Maduro.

Le dirigeant de gauche a été proclamé avec 52% des voix pour un troisième mandat de six ans, jusqu'en 2031. L’opposition, dirigée par María Corina Machado, revendique la victoire de son candidat Edmundo González Urrutia lors des élections du 28 juillet, ce que le président considère comme une incitation à un "coup d'État" et à une "guerre civile".

Sa réélection a déclenché des manifestations qui ont fait 25 morts, 192 blessés et plus de 2 200 détenus, au milieu des appels des États-Unis, d'Europe et de plusieurs pays d'Amérique Latine pour que le Conseil national électoral (CNE) présente le scrutin détaillé de l'élection.

Le président de l'Assemblée nationale unicamerale, Jorge Rodríguez, a annoncé à Maduro qu'il se consacrera au cours de la présente session à la tâche de "faire adopter un paquet de lois que vous avez demandées pour protéger et défendre notre population contre la haine".

Le chavisme possède 256 des 277 députés de l'Assemblée nationale. Le paquet de lois inclut la réglementation des réseaux sociaux, une loi pour punir le "fascisme", terme que le gouvernement utilise également pour désigner ses détracteurs, et une autre pour réguler les ONG.

Cette dernière figure en premier point à l'ordre du jour de la session convoquée pour ce mardi à 18h00 GMT.

Nicolás Maduro aux côtés de Diosdado Cabello (REUTERS/Leonardo Fernández Viloria)

“Façade” de terrorisme

Les ONG sont une cible fréquente d'attaques depuis le pouvoir.

“Il y a beaucoup d'organisations non gouvernementales qui sont la façade pour le financement d'actions terroristes”, a déclaré Rodríguez lors d'un acte lundi avec Maduro. Un “discours stigmatisant”, selon Gina Romero, rapporteuse spéciale des Nations Unies pour la liberté d'association.

La première discussion remonte à 2023, bien que son contenu ait été modifié après que son promoteur, le puissant dirigeant Diosdado Cabello, ait accusé 60 organisations de manœuvres de “déstabilisation”.

Selon le projet, les organisations doivent s'inscrire dans un registre local et déclarer leurs voies de financement, souvent étrangères.

Le non-respect de cette obligation implique également des amendes qui peuvent atteindre 10 000 dollars.

“Elles sont réglementées dans presque toutes les parties du monde, mais pas au Venezuela”, a protesté Rodríguez.

Dans la région, il existe des normes similaires à Cuba, au Nicaragua, au Guatemala et en Bolivie.

Romero a également déploré que la reprise du débat se fasse “dans un contexte de répression post-électorale féroce”, qui crée un “climat de peur généralisée”.

Réseaux et fascisme

“Le Venezuela doit réglementer le fonctionnement des réseaux sociaux”, a également exprimé Rodríguez.

Maduro assure que les réseaux sont utilisés pour s'attaquer à sa réélection : il a suspendu le réseau social X pendant 10 jours après avoir accusé son propriétaire, Elon Musk, d'inciter à la haine et au fascisme ; il promeut également un boycott contre WhatsApp.

C'est une escalade dans le système de censure (...), le gouvernement identifie les réseaux sociaux comme le mécanisme par lequel les gens parviennent à s'informer”, a expliqué récemment à l'AFP Giulio Cellini, directeur de la société de conseil politique Log Consultancy.

Rodríguez a proposé d'incorporer dans une norme controversée qui punit jusqu'à 20 ans de prison les “crimes de haine”, souvent utilisés contre les opposants, des “éléments liés à la propagation de la haine sur les réseaux sociaux”.

Maduro a en fait demandé une “main de fer et une justice sévère” face à “la violence” et aux “crimes de haine”, qu'il attribue à Machado et González Urrutia.

Il a déjà demandé la prison pour ces deux derniers, qui sont passés dans la clandestinité.

À l'ordre du jour figure également la “Loi contre le fascisme, néo-fascisme et expressions similaires”, approuvée également lors de la première discussion et qui punit la promotion de réunions ou de manifestations qui font “apologie du fascisme”.

Elle propose également l'illégalisation des partis politiques et des amendes allant jusqu'à 100 000 dollars pour les entreprises, organisations ou médias qui financent des activités ou diffusent des informations qui “incitent au fascisme”.

“Pratiquement tout est du fascisme” pour le gouvernement, a questionné Alí Daniels, avocat et directeur de l'ONG Acceso a la Justicia, dans une interview avec l'AFP en mai.

(AFP)