L'ONU a dénoncé des détentions arbitraires, un usage disproportionné de la force et le "climat de peur" au Venezuela après la fraude électoral de Maduro.

Publié le 13.08.2024
Le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Volker Türk (EFE/Johnson Sabin)

Le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme a exprimé ce mardi sa profonde préoccupation face au nombre élevé de "détentions arbitraires" au Venezuela et à l’"usage disproportionné" de la force qui "alimente le climat de peur" depuis les élections présidentielles.

“Il est particulièrement inquiétant que tant de personnes soient arrêtées, accusées ou mises en examen pour incitation à la haine ou en vertu de la législation antiterroriste. Le droit pénal ne doit jamais être utilisé pour limiter indûment les droits à la liberté d'expression, de réunion pacifique et d'association”, a affirmé Volker Türk dans un communiqué.

Türk a exprimé tout particulièrement sa "profonde préoccupation" pour la crise actuelle, après que les chiffres officiels aient déjà parlé de plus de 2 400 détentions au cours des quinze derniers jours. Parmi les arrêtés, comme le rappelle l'ONU, figurent des personnes liées à l'opposition, qui a dénoncé une fraude électorale.

Les Nations Unies ont signalé que certains cas pourraient même équivaloir à des disparitions forcées et ont déploré que certains détenus n'aient pas eu la possibilité de choisir un avocat ou de contacter leurs familles. Türk a réclamé des garanties judiciaires, ainsi que la "libération immédiate" de toute personne ayant été arrêtée de manière arbitraire.

Répression au Venezuela suite à la fraude électorale de Maduro

D'autre part, il a appelé à éradiquer l'“usage disproportionné” de la force, ce qu'il a attribué non seulement aux organismes officiels au service du régime de Nicolás Maduro mais aussi à des individus armés qui soutiennent l'administration chaviste.

De plus, il a dénoncé des actions violentes contre des fonctionnaires publics et des institutions et a insisté sur le fait que "la violence n'est jamais la réponse", selon la note diffusée par son bureau.

Toutes les morts dans le contexte des manifestations doivent être enquêtées et leurs responsables doivent rendre des comptes”, a-t-il souligné.

À la liste des préoccupations du Haut-Commissaire s'ajoute l'éventuelle adoption d'une loi criminalisant les ONG ou une autre destinée supposément à poursuivre des allusions fascistes, car il craint qu'elles ne servent en fin de compte à “miner l'espace civique et démocratique” dans ce pays d'Amérique du Sud.

Türk a indiqué que la communauté internationale “a un rôle fondamental” et qu'elle doit promouvoir un dialogue centré sur les questions des droits de l'homme. “Comme toujours, mon bureau est prêt à collaborer”, a-t-il ajouté.

Des proches des détenus pendant la répression gouvernementale des manifestations contre les résultats des élections présidentielles participent à une veillée à Caracas, Venezuela, le 8 août 2024. La pancarte dit "Libérez tous les prisonniers politiques" (AP Photo/Matías Delacroix)

La Mission de l'ONU pour le Venezuela a exigé la fin de la répression

Les semaines qui ont suivi les élections ont été marquées par des manifestations tant dans les rues que sur les réseaux sociaux, à quoi l'État a répondu par une répression féroce dirigée par les plus hautes autorités. La Mission a documenté 23 décès survenus entre le 28 juillet et le 8 août, la plupart par des tirs d'armes à feu dans le cadre des manifestations. Parmi ces victimes, 18 étaient des hommes de moins de 30 ans, ce qui a généré un climat de peur généralisé au sein de la population.

“Les morts signalées dans le cadre des manifestations doivent être enquêtées en profondeur et, si un usage abusif de la force létale par les forces de sécurité et la participation de civils armés agissant avec la complicité de ces corps sont confirmés, les responsables doivent rendre des comptes”, a affirmé Marta Valiñas, présidente de la Mission. “Les victimes et leurs familles doivent obtenir justice”.

Marta Valiñas, présidente de la Mission

La Mission a signalé que, depuis le 28 juillet, au moins 1 260 personnes ont été arrêtées, dont 160 femmes, bien que le Procureur général de la République ait porté ce chiffre à 2 200, les qualifiant indûment de “terroristes”. Les arrestations se concentrent principalement dans le District Capital (18 %), suivi des États de Carabobo (16 %) et Anzoátegui (9 %).

Selon la Mission, ces détentions se caractérisent par de graves violations du droit à un procès équitable, y compris des audiences téléphoniques sommaires et l'imputation de charges pénales disproportionnées telles que le terrorisme, la conspiration et les délits de haine. De plus, il a été signalé que les informations étaient niées aux familles des détenus et qu'il leur était impossible de désigner des avocats de confiance, laissant les détenus dans un état d'impuissance.

“Toutes les personnes détenues arbitrairement doivent être libérées immédiatement”, a déclaré Patricia Tappatá, experte de la Mission. “Les autorités doivent respecter sans réserve les normes internationales concernant le droit à un procès équitable et les conditions de détention”, a-t-elle ajouté.

(Avec des informations d'AFP et d'Europa Press)